A l’occasion de la comagri du 25 mai à Bruxelles, Romano Prodi est venu s’exprimer dans le cadre des débats sur l’avenir de la PAC. Ses propos, empreints de pessimisme et de franchise, n’ont pas laissé les députés de marbre.
Tout à tour, il a dénoncé les politiques actuelles qui nous amènent vers une pénurie, les tendances néocolonialistes en Afrique de la part de la Chine et de la Corée dans leur lutte pour s’approprier les sols qui mettent en danger la capacité à l’autosuffisance sur ce continent. Mais ce phénomène est lié à des décisions politiques qui dépassent largement le cadre de l’agriculture.
En matière d’environnement, il a fustigé les émissions de CO2 et de nitrates qui, malgré de nombreuses recherches ne bénéficient pas d’avancées flagrantes face aux défis qui nous attendent.
Parmi les pistes de réflexion souhaitables qu’il préconise si l’on veut que notre agriculture continue à produire, la rétribution à hauteur de l’effort du travail fourni afin de résoudre le problème des niveaux de prix actuels. Car certes, il faut augmenter la production, mais aussi les rémunérations. Une politique d’aide sans distorsion des marchés est donc toujours d’actualité.
La gestion des marchés mondiaux agricoles est aussi dans le collimateur. La mondialisation n’a rien du paradis sur terre ; hormis pour les spéculateurs. Le constat d’un manque de gouvernance mondiale en matière agricole doit amener une réflexion notamment dans le cycle des négociations de Doha. Mais le pessimisme reste de mise devant le manque de temps. Le besoin d’une mondialisation maîtrisée ne mettant pas de côté les Pays en Voie de Développement (PVD) est nécessaire afin d’éviter une totale asymétrie au niveau mondial. Cette asymétrie s’accentue d’autant que si les pays développés disposent de ressources pour s’adapter, il est loin d’en être de même pour les PVD. Les besoins d’une autorité supranationale ou d’un accord politique entre tous pourraient être une solution. Par ailleurs, une pénurie au niveau mondial ne pourra qu’accentuer cette asymétrie entre pays producteurs et pays importateurs. Encore plus inouïe l’interdiction d’exportation. Il faut tirer le signal d’alarme devant cette aberration dans la mondialisation. Pointée du doigt, la contradiction entre la globalisation des marchés et des Etats qui veulent préserver leur pouvoir pour protéger leurs opérateurs nationaux
Les marchés ne sont donc pas la panacée. Ils sont loin de résoudre les problèmes d’accaparement des terres par exemple. Devant les gâchis d’un système qui conduit au gaspillage, la PAC suffirait-elle à changer les choses ? Des efforts en Recherche & Développement pour changer nos habitudes alimentaires devraient être accentuées au lieu d’’être mises de côté comme actuellement; et un système d’aide n’amenant pas de distorsion doit être la priorité du politique qui doit mieux accompagner les phénomènes actuels.